Comment capter le regard d’un enfant avec un TSA ?

regard

Depuis quelques années seulement, nous commençons à nous intéresser aux troubles du spectre de l’autisme. Même si les origines ne sont pas encore totalement déterminées, nous savons qu’un terrain génétique n’est pas à exclure. Quelque soit les raisons ou même le profil de votre enfant, une amélioration est possible si la prise en charge est bien adaptée. Le cerveau étant très malléable jeune, plus tôt nous agissons et plus les résultats seront visibles. Beaucoup d’ouvrages affirment que l’on ne guérit pas de l’autisme, mais tous sont unanimes sur les bénéfices d’un accompagnement adéquat. Il existe autant d’autistes que de forme d’autisme. « Si vous connaissez une personne avec autisme, eh bien, vous connaissez une personne avec autisme, et non l’autisme » (Peter Vermeulen, 2020). Toutefois, une triade caractéristique permet de dissocier les TSA des autres troubles neurodéveloppementaux, à savoir :

  1. un déficit de la communication, quelle soit verbale ou non verbale;
  2. un déficit de l’interaction sociale ;
  3. une limitation de l’imagination et des intérêts présentant un caractère stéréotypé

Nous allons aborder dans cet article les troubles de la communication via le regard chez les personnes présentant un profil autistique. C’est un aspect essentiel car c’est par le maintien du regard que les informations passeront. Un enfant qui ne regarde pas est un enfant qui passera à côté de milliers d’occasions d’apprentissage.

Pourquoi les autistes évitent-ils de regarder dans les yeux ?

Nous n’avons aucune certitude à l’heure actuelle quant aux raisons de cette défaillance communicationnelle. Cependant, plusieurs pistes de compréhension nous guident actuellement pour expliquer l’évitement du regard de certaines personnes autistes. En effet, regarder dans les yeux d’une autre personne constitue pour eux :

  • un trop-plein sensoriel : il y a trop d’éléments à regarder dans un visage perpétuellement en mouvement : les yeux bougent, les paupières s’ouvrent et se ferment, les sourcils se lèvent… Une quantité importante d’informations à prendre en considération lui arrive en une seule fois, et faire un tri semble impossible. D’autre part, certaines personnes porteuses d’autisme présente une hypersensibilité visuelle, c’est-à-dire qu’elles sont plus sensibles à certaines caractéristiques que les autres personnes (mouvements, luminosité…) et plus à même de moins les supporter.
  • un coût attentionnel : Les personnes avec TSA présentent très souvent une plus grande difficulté pour se concentrer que les neurotypiques. Si elles doivent maintenir un contact visuel avec quelqu’un, cela l’empêchera de porter son attention sur autre chose. C’est-à-dire qu’elle pourrait très bien vous regarder mais sans écouter ce que vous avez à lui dire. Cela est aussi dû en partie à l’intimité initié du regard plongé dans celui d’un autre, très dérangeant.

« Vous pouvez avoir mon contact avec les yeux, ou vous pouvez avoir ma concentration. Choisissez ce qui vous semble avoir le plus de valeur. »

Chris Bonnello
regarde d'un enfant étonné

Comment capter l’attention d’un enfant avec TSA?

Afin de communiquer correctement avec son enfant porteur de TSA, il est indispensable d’être sûr d’avoir capté, au préalable, son attention. Les personnes avec autisme sont très facilement distraites. Elles sont plus à l’aise avec des objets qui sont plus prévisibles, répétitifs et moins changeants que des êtres vivants. Il faut donc les amener progressivement à trouver de l’intérêt à entrer en communication avec nous.

Tout d’abord, il faut s’assurer d’être bien en face de lui, à la même hauteur, sur le sol, un canapé, un lit ou une chaise, afin d’avoir plus de chances d’être vu. Vous pourrez, ainsi positionné, procéder à toutes les tâches de la vie quotidienne, comme manger, prendre le bain, faire un jeu, chanter une chanson… Il faudra également épurer au mieux l’espace dans lequel vous vous situez, afin d’éviter autant que possible les distracteurs potentiels. Une décoration simple, non surchargée, sera préférable. Les jouets seront rangés dans des placards par exemple.

Concernant l’activité à proposer, s’il exprime des préférences, vous pourrez partir de ses désirs, de ce qu’il aime faire, pour vous joindre à lui. Votre enfant sera davantage dans le partage et les apprentissages se feront plus facilement en s’amusant. Vous pourrez ensuite, progressivement, ajouter des petites variantes pour l’amener à jouer autrement et/ou avec d’autres jeux (éviter les jeux électroniques).

bon moment en famille

Petite liste, non exhaustive, à faire au quotidien

Je vous propose ici toute une liste de petites choses à réaliser au quotidien avec votre enfant pour l’aider à progresser dans le domaine de la communication. Les débuts seront forcément difficiles, mais chaque petite réussite représentera une grande victoire. Vous pouvez bien évidemment choisir les points qui vous semblent intéressants et possibles à réaliser, en fonction du matériel dont vous disposez. N’hésitez pas non plus à compléter cette liste, non exhaustive. C’est pas à pas que les progrès s’inscriront dans le temps.

Travailler l’attention conjointe

  • utiliser un faisceau pour attirer son regard vers un endroit précis, que vous manipulerez à tour de rôle
  • lire un livre ou regarder une grande image et poser des questions simples
  • dans le noir, éclairer à l’aide d’une lampe de poche des objets et les nommer. Vous travaillerez également le vocabulaire et vous vous assurerez qu’il reste concentré
  • faire des ombres chinoises

Favoriser le contact visuel

Il faut également mettre en place au maximum des jeux impliquant un contact visuel direct avec l’enfant, comme par exemple :

  • tourner sur une chaise d’ordinateur, puis l’arrêter juste devant vous
  • les routines socio-sensorielles, telles que « je te tiens, tu me tiens par la barbichette », les comptines à gestes (les roues de l’autobus…) ou coucou-caché
  • se faire remarquer : utiliser des objets attractifs (gommettes, lunettes, nez de clown, maquillage…) pour attirer son regard, faire semblant d’avoir le hoché, lever les sourcils très haut, exagérer les expressions du visage
  • lui demander « de quelle couleur sont les yeux de… » pour l’inciter à regarder afin d’avoir la bonne réponse
  • l’inciter à regarder quand il donne ou qu’on lui donne quelque chose
  • se taire au milieu d’une phrase d’un sujet qui l’intéresse ou d’une chanson
  • faire semblant de manger les parties de son corps (en les nommant), faires des chatouilles
  • cacher un objet dans une main et lui demander où il est
  • imiter ses gestes, sa démarches, ses intonations ou répéter ce qu’il dit

Développer sa motricité oculo-manuelle

Il ne faut pas hésiter non plus à faire travailler sa motricité oculo-manuelle, à savoir le lien qui s’opère entre l’œil et la main, à l’aide de petits gestes du quotidien qui se transforment en jeu :

  • viser des cibles (basket, bowling, fléchettes…)
  • lancer un ballon avec la main ou le pied
  • enfiler des perles suffisamment grosses puis de plus en plus petites
  • faire des jeux graphiques (points à relier, labyrinthes…)
  • coller des autocollants
  • découper suivant un trait droit ou en courbe
  • faire des jeux de transvasement (eau, sable…)
  • faire des jeux de construction (puzzle, cube de construction…)
  • réaliser des activités quotidienne (mettre la table, servir à boire…)
Féliciter un enfant qui réussi

En conclusion

Il y a tant d’activités à réaliser au quotidien pour essayer de faire progresser son enfant à la maison. Les prises en charge ne se font que sur quelques heures à peine sur une semaine, il faut optimiser au mieux le temps passé avec votre enfant en dehors de celles-ci. Les résultats ne seront certes pas immédiats, en fonction du niveau de votre enfant. Si vous constatez qu’il éprouve des difficultés dans un domaine, n’hésitez pas à en changer pour ne pas le mettre en situation d’échec et à y revenir plus tard en baissant le niveau demandé si possible. Et surtout, encouragez votre enfant dès qu’il réussit une activité, applaudissez-le, prenez-le dans vos bras, il n’y a pas meilleure récompense à ses efforts !


Vermeulen P. (2020), Mon enfant est autiste, De Boeck Sup

Le blog d’Hop’toys

© Article écrit par Pauline GEORGE | Psy en ligne